lundi 14 septembre 2009

Littérature de poussin


Bon. Qu'on se le dise : la fille qui lit de la chick lit (de chick literature, à peu près "littérature de poulettes"), ce qu'elle veut, c'est sensiblement la même chose que la mère de famille qui lit un Harlequin : une histoire d'amour excitante, pleine de rebondissements et de suspense, mais tout au long de laquelle elle SAURA que l'héroïne finira avec le héros. Et elle veut aussi que, même si elle le sait, elle puisse espérer tout le long que ça arrive, pour que sa satisfaction quand ça finira par arriver soit immense. J'irais jusqu'à dire : cathartique. Parce que la lectrice de chick lit, elle veut vivre, par procuration, tous les frissons de l'histoire d'amour enlevante en restant sagement avec son chum ou son mari, ou alors avec son chat, en espérant vivre la même chose un jour, mais pour vrai. Et en lisant ladite histoire d'amour, elle purge ses passions. Si si, comme au théâtre, mais en moins subtil.

Bon, je dis ça, dans le fond j'ai juste lu deux romans de chick lit dans ma vie. Le premier, c'était pour un travail sur le postféminisme dans un cours sur la littérature des femmes au Québec (et c'était Soutien-gorge rose et veston noir de Rafaële Germain, en l'occurrence). L'autre, c'était absolument pour rien, parce que c'était l'été et que j'avais envie de quelque chose de pas intellectuel, et bon, évidemment, parce que j'avais envie d'une histoire d'amour enlevante. J'ai donc emprunté l'autre livre de Rafaële Germain à une amie. Le premier, s'il était terriblement médiocre sur le plan du style, avait eu le mérite de me donner envie, tout au long de ma lecture, que telle fille finisse avec tel gars. J'espérais à peu près la même chose du deuxième, pas plus.

Déception. Ce deuxième livre ne respecte absolument pas les règles du genre (voir plus haut). Non seulement l'héroïne ne finit pas avec le gars avec qui on voudrait qu'elle finisse, mais on a l'impression qu'elle fait la morale à sa lectrice en lui disant de vieillir, d'être plus sage, d'avoir moins peur, d'avoir moins d'espoirs fous, et d'accepter d'aimer le gars gentil, doux, bon pour elle. Bref, d'être une ADULTE. Bordel. La lectrice de chick lit ne veut surtout pas que l'héroïne devienne une adulte, et encore moins qu'on lui demande de faire pareil. Justement : elle veut que l'héroïne soit jeune et folle, pour pouvoir se vautrer dans la nostalgie de cette époque où elle l'était, elle aussi, ou encore pour s'identifier à elle. Mais là, dans Gin tonic et concombres, zéro identification. Complètement raté.

Ce que je trouve le plus triste, dans tout ça, c'est que si on enlève l'étiquette un peu culpabilisante mais rassurante de chick lit à ce livre, qu'est-ce qui reste? Rien, sinon le constat désolant que l'auteure de ce livre n'est pas une bonne écrivaine. L'histoire est entortillée, c'est mal écrit, et c'est même pas satisfaisant.

Mais alors, dites-moi : pourquoi est-ce qu'autant de filles le lisent malgré tout?

5 commentaires:

Marie-Pier a dit…

Et moi qui voulait en faire mon premier livre de chick lit. C'est raté. Il faut que je trouve autre chose.... :P

Esquimaude a dit…

Lis Soutien-gorge rose et veston noir. C'est pas mieux écrit, mais au moins c'est satisfaisant.

Ariane a dit…

Je n'ai jamais lu Rafaêle Germain, tout sîmplement parce que je ne lui trouve aucun talent (je lisais parfois ses chroniques, du temps qu'elle écrivait dans La Presse, et c'était du plagiat de Sex and the City, mais en mauvais). Si elle n'avait pas les parents qu'elle a, cette fille n'aurait pas de carrière.
Ceci étant dit, je suis une grande fan de chick lit, alors si vous voulez des conseils, faites-moi signe!

Esquimaude a dit…

J'en veux, ça va peut-être me réconcilier avec le genre...

Valérie Auclair a dit…

Merci d'avoir mis des mots intelligents sur mes impressions! Je relis Soutien-gorge rose... à peu près une fois par année, au point où je peux passer les pages sans les lire et me souvenir de tout ce qui s'y passe. C'est une pause pour l'esprit, et je suis tout à fait d'accord avec la catharsis et tout. C'est extrêmement satisfaisant. Pour Gin tonic..., un gros turn-off dans ma lecture avait aussi été la trop grande ressemblance avec le premier roman: à peu près même structure familiale, drame hospitalier, fille pognée entre amour et gang de chums... Je trouvais les personnages du 1er plus crédibles, aussi.
Enfin, bref. Pour de la bonne chick lit, lisez "L'accro du shopping". C'est traduit en France, donc pas super sur le plan stylistique, mais c'est très, très satisfaisant.