dimanche 27 juin 2010

Berlin, ville de rock


Me revoilà après presque deux mois d'absence. C'est que j'ai tendance à me lasser vite dans la vie, je vous l'ai déjà dit. Et j'ai aussi tendance à partir longtemps en voyage et à n'avoir rien à cirer, une fois là-bas, de ce qui se passe sur les Internets. Au retour, par contre, avec les journées qui semblent soudain avoir multiplié leur nombre d'heures par deux, ça me rattrape. Me voici donc, pour vous parler de l'endroit au monde où j'ai désormais le plus envie de retourner : Berlin.

Tout a sans doute été dit et redit. Berlin est la ville du 20e siècle, elle a l'histoire du monde gravée partout, jusque dans les rares marques de balle qui subsistent sur les édifices, et pourtant, elle a les deux pieds dans l'avenir. Elle se reconstruit de tous les côtés, elle n'est que chantier et anachronisme architectural. Et c'est beau, cette drôle de courte-pointe de neuf-reconstruit-comme-du-vieux, neuf-construit-comme-du-neuf, vrai-vieux, neuf-mémorial et vieux-bloc-de-l'Est. C'est encore plus beau quand c'est couvert de graffitis.


Je me demande ce que c'est que d'être jeune à Berlin en ce moment. Ce que c'est que d'avoir le poids du passé à se secouer des épaules pour réinventer sa ville, pour se trouver un avenir. Ce que c'est que de vivre dans un mélange d'Ostalgie, de négation du nazisme, de culpabilité, et d'ébullition contemporaine. Ce que c'est que de vivre avec un taux de chômage qui frôle les 20%. Ce que j'en sais, je le tiens de deux Allemands : l'un qui a choisi de quitter la ville plusieurs fois pour de très longues périodes, pour étudier ailleurs; l'autre qui y reste et qui, à travers ses études en art graphique, peint sur les murs de la ville, gravite dans le milieu underground et en donne, un avant-midi par semaine, un aperçu aux touristes curieux. Le plus cynique n'est pas celui qui s'est éloigné.

À Berlin, aussi, on peut boire dans la rue. Au début, en bons petits Québécois obéissants, on est incertains, on a presque envie de cacher notre bière sous notre chandail. Puis on se rend compte que tout le monde ou presque en a une à la main, alors on en fait une habitude, nous aussi. À Berlin, il y a partout des petits comptoirs où on peut acheter de la currywurst, une saucisse dans une espèce de sauce qui goûte le curry et le ketchup chaud. Et à l'épicerie, ça prend un dictionnaire pour choisir sa sorte de saucisse - enfin, quand on ne parle comme moi que 22 mots d'allemand. À Berlin, aussi, les pictogrammes portent des chapeaux. Et partout, il y a beaucoup beaucoup de vélos. Et un système de transport en commun qui est le seul au monde à être utilisé en dessous de sa capacité. Et une université qui vend des livres dehors tous les jours de l'année pour se racheter d'avoir participé à l'Autodafé. Et des grosses compagnies qui rachètent des vieilles gares réaménagées en marché aux puces et en skatepark pour tout jeter à terre et en faire un centre d'achats.

Près de Berlin, il y a aussi Sachsenhausen, un camp de concentration pas connu mais tout aussi terrible que les autres. Et Sans-souci, un drôle de château rococo où Voltaire a séjourné quelque temps. C'est à Potsdam, là où la carte de l'Europe (de 1945 à 1989) a été dessinée par Churchill, Truman et Staline.


Et quand on va à Berlin, il faut y retourner quelques années plus tard, quand la ville aura encore changé de face, pour le meilleur et le pire.