samedi 30 janvier 2010

Littérature vs "malbouffe culturelle"


La Presse d'aujourd'hui consacre les premières pages de son premier cahier (et ce n'est pas peu dire) aux lectures obligatoires au secondaire. Moi qui trouve qu'on ne parle pas assez de littérature dans les médias, je ne me plains pas. D'autant plus que la tendance générale des articles est qu'on ne devrait pas imposer des oeuvres aux profs de français, mais tenter de rendre le cheminement des élèves un peu plus cohérent en suggérant une progression.

Pas fou. C'était le cas à mon école secondaire (privée, shame on me). Je me rappelle en tout cas qu'en secondaire 3, on lisait surtout des contes; en secondaire 4, du théâtre et des oeuvres françaises; et en secondaire 5, de la littérature québécoise. Et, si je me souviens bien, on avait une dizaine d'oeuvres à lire chaque année, soit le double des cinq oeuvres recommandées par le Ministère. Et pas de ce que Lise Bissonnette appelle de la "malbouffe culturelle".

Car il y a là une grosse part du débat dans les pages de La Presse : jusqu'à quel point devons-nous mettre au programme des livres que les jeunes vont aimer (certains font lire Twilight) sous prétexte qu'on veut leur faire aimer la lecture? Et doit-on absolument lire Maria Chapdelaine sous prétexte de se forger une culture?

Personnellement, je suis plutôt au centre du débat. Pour le plaisir de lire, mais contre le best-seller à tout prix. Pour la culture, mais contre l'imposition d'oeuvres qui risque de dégoûter les élèves de la lecture. Si, au secondaire, on m'avait donné à lire Twilight (ou un roman ado de la Courte échelle, malgré tout le respect que j'ai pour cette maison), j'aurais franchement décroché. Mais j'ai décroché aussi à Maria Chapdelaine. Tout est une question de dosage. On peut faire dans l'amusant tout en se cultivant. Allez lire Assommons les pauvres de Baudelaire, vous verrez de quoi je parle.

Malgré tout l'intérêt que je porte à la littérature de genre (je ferais lire un Simenon ou un Asimov à mes étudiants sans problème), je reste quand même méfiante envers ceux qui n'enseignent que ça sous prétexte que "les faire lire, c'est déjà une victoire". Élitisme universitaire, me direz-vous? Je ne sais pas. Oui, il faut tenir compte du fait que les élèves, souvent, n'aiment pas lire. Mais si l'école ne les pousse pas à sortir des ornières de la culture populaire, ne serait-ce que le temps d'un seul livre, ils ne le feront jamais. Ils continueront de consommer des films hollywoodiens et des télés-réalités, et ne sauront pas trop qui sont Michel Tremblay et Émile Zola. Est-ce le genre de spectateurs/lecteurs qu'on veut former?

En fait (et c'est triste à dire), ce que je vois chez les futurs enseignants au secondaire que je côtoie depuis 4 ans me pousse à me demander jusqu'à quel point les profs de français qui font lire Twilight le font pour faire lire les élèves, ou parce qu'ils ont eux-mêmes peur des oeuvres dites "classiques"...

3 commentaires:

Catherine a dit…

Il y a peut-être aussi une question de longueur : pour encourager les élèves à lire, pourquoi ne pas leur proposer des pièces de théâtre, des recueils de nouvelles ou des romans moins volumineux?

Personnellement, j'ai toujours vu une grosse brique comme un beau défi, mais je sais que ce n'est pas le cas pour tout le monde. Même un roman comme Twilight ou le Code da Vinci peut en décourager plus d'un par leur gros format.

Peut-être qu'en optant pour des choses qui se lisent rapidement (La ferme des animaux?), on pourrait faire apprécier la lecture sans baisser les critères qui régissent le choix des textes? D'autant plus que ça pourrait donner la possibilité de faire lire plus d'ouvrages en autant de temps et d'augmenter les chances de tomber dans les goûts d'un plus grand nombre de jeunes.

Anonyme a dit…

Au nombre de Stephen King que j'ai lus ado, je serais bien mal placé de défendre l'idée qu'une patente comme Twilight est inacceptable. On est ti-cul pas à peu près (les gars en particulier...) de 13 à 19 ans. Ceux qui lisent même les plus ineptes best-sellers à formule ont 123 fois plus de chance de passer à plus sérieux quand ils vieilliront que ceux qui lisent pas, ou qui se font forcer une "platitude" comme L'étranger dans la gorge. Votre connaissance du cinéma, vous l'avez commencée par Clouzot, vous?

Esquimaude a dit…

C'est sûr que commencer avec l'Étranger, ce serait pas très futé. Pour moi, il faut commencer avec ce qui sera plus facile d'accès/plus le fun à lire (mettons Stephen King : j'ai lu Shining au secondaire, c'était cool), mais pour que ça mène ensuite à quelque chose de plus intense, au bout du compte. Tsé, une progression.

Mais je pense que je me répète, y me semble que j'ai déjà dit tout ça dans mon message.